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Colonisation : Touho Tension et Tragédie.

À Touho, ce ne sont plus les cendres de la colonisation qui brûlent, mais les braises ardentes des rancunes intestines. Le rêve indépendantiste, porté jadis par des chants d’espoir et des discours enflés de justice, se transforme ici en un episode tribal où la loi du plus fort supplante le droit des peuples. On expulse, on menace, on règle des comptes à l’ombre des cases, pendant que les grands mots de la lutte s’estompent dans les silences complices des responsables.

Des familles kanak, arrachées à leur terre natale par d’autres Kanak. Voilà l’image tragique d’un peuple qui, au lieu d’édifier une démocratie coutumière éclairée, préfère rejouer les tragédies fratricides. Où est donc passée la souveraineté partagée tant vantée ? Où se cache le destin commun quand des gendarmes escortent des femmes et des enfants sous les cris haineux de leurs propres cousins ? Ce n’est plus la France coloniale qu’il faut dénoncer : c’est le miroir que la communauté se refuse à regarder.

Et pourtant, ce drame n’est pas une exception. Il est une constante. Il suffit de remonter le fil sanglant de l’histoire pour constater que les conflits entre autochtones sont légions, comme si l’indépendance n’était qu’un mirage masquant une guerre des clochers. Souvenons-nous : les expulsions de familles wallisiennes de Saint Louis et de l’Ave Maria entre 2001 et 2004 chassées au nom d’un prétendu équilibre communautaire. Ou encore, plus récemment, en novembre 2020, lorsque 130 habitants de la tribu de Roh, sur l’île de Maré, furent évacués dans l’urgence après une expédition punitive aux relents de justice clanique.
Les causes changent, la violence demeure.

L’histoire, décidément, n’éclaire rien, n’éduque pas.
Le passé n’est ni assumé ni transcendé. On répète les erreurs comme des rituels sacrés, avec en plus le silence pesant des autorités coutumières et politiques, trop souvent muettes face à ces dérives.

Alors faut-il croire que l’indépendance offrira un avenir plus radieux ?
Si déjà aujourd’hui, en terre française, le chaos gagne du terrain et la violence s’exerce entre « frères de lutte », que restera-t-il demain lorsque l’État colonial se retirera définitivement ?
Des palabres sans paix, des armes sans lois, des lendemains peut-être sanglants…

Et si Touho entre tension et tragédie était une prophétie ? Comme la préfiguration d’une future République Kanak où règnerait le droit du plus fort au lieu du respect de tous ?

Alexandre Rosada juin 2025

Alexandre Remo ROSADA

Écrivain et Journaliste.

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