Du Verbe fait Chair
Au commencement était le Verbe, et le Verbe s’est fait chair, nous rappelle Jean, l’apôtre bien-aimé. Ces paroles, portées par les siècles, résonnent encore comme un mystère fondamental. Mais comment s’est accompli ce passage ? Comment l’immatériel, le Verbe, s’est-il incarné dans la chair, dans l’humanité, dans la création ?
Dans nos vies terrestres, parcourant des paysages baignés de lumière, échos du Verbe primordial, la quête de compréhension semble infinie. Pourtant, à y regarder de plus près, nous ne sommes pas simplement des poussières éphémères vouées au néant. Nous sommes des microcosmes, reflets du macrocosme, des fragments de l’univers, humbles spectateurs de son immensité.
Notre constitution même, faite de feu, d’air, d’eau, et de terre, témoigne de cette alchimie sacrée. Issus du néant, nous sommes porteurs d’une vibration première, celle du Verbe, cette énergie qui relie le haut et le bas, l’esprit et la matière, dans une unité mystérieuse. Cette dualité apparente n’est qu’un passage, un pont entre le fini de nos corps et l’infini du monde.
La pierre brute et le cheminement intérieur
Pour saisir ce mystère, contemplons une analogie : celle de la pierre brute qui devient pierre cubique. N’est-ce pas là une image de notre propre transformation, de l’élévation de notre être physique et spirituel ? Tout en nous est mouvement, tension entre chaos et ordre, œuvre en devenir et harmonie pressentie.
Ainsi ce passage du Verbe à la chair nous interroge sur notre humanité, notre corps, et notre essence profonde, qu’elle soit masculine ou féminine. Au-delà des dogmes et des certitudes, il est légitime d’explorer la place des deux genres dans cette dynamique divine du Verbe.
Sophia : l’éternel féminin dans le Verbe
L’androgyne primordial, cet Adam originel, portait en lui la plénitude des états masculin et féminin. Dès lors, ne peut-on penser que l’élément féminin, souvent voilé dans les traditions, est une dimension essentielle du Logos ? Une Sophia aimante, sagesse d’essence divine, complémentaire à l’esprit du feu masculin.
Cette hypothèse, que de nombreux hermétistes tel Jacob Boehme ont explorée, ouvre une porte vers une vision quaternaire de la divinité : au Père, au Fils et au Saint-Esprit, s’ajoute un quatrième pilier, celui de la Sagesse féminine, matrice et initiatrice de l’amour parfait.
De la chute au salut : Eve et Marie
Dans le récit de la Genèse, Dieu annonce que c’est par “la semence de la femme” que sera brisée la tête du serpent. Cette précision n’est pas fortuite : elle met en lumière la dimension rédemptrice de l’élément féminin. L’homme, porteur de l’esprit du feu, trouve en la femme, esprit de l’eau, une compagne qui l’initie à l’Amour, cet amour qui pardonne tout, croit tout, espère tout.
Depuis la chute adamique, cette figure féminine trouve son écho dans la Vierge Marie, mère de tous les vivants, passage ultime du Verbe à la chair. En elle se réalise l’espérance de l’humanité, le salut par l’incarnation.
Nous, porteurs de la transcendance
Alors, le Verbe fait chair, c’est nous : hommes et femmes, porteurs du Logos, fragments d’un mystère plus grand. En nous, la transcendance du Verbe se conjugue à l’immanence de notre humanité. En quête de la Parole perdue, nous sommes appelés à incarner ce Verbe, à le faire vivre dans le monde.
La lumière du Verbe illumine notre chemin, entre ciel et terre, entre esprit et matière. Elle nous rappelle que, dans notre fragilité, réside une grandeur : celle d’être, nous aussi, des expressions du Verbe éternel.
Alexandre Rosada @décembre 2024
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