CONNAISSANCE et DISCERNEMENT.

CONNAISSANCE ET DISCERNEMENT

 

Combattre l’ignorance

Le discernement serait-il  inné ? A cette question il serait sage de répondre non ! et d’admettre que le discernement est acquit.
Une acquisition par l’expérience. Car il  est un éveil de la conscience. Un  éveil lui-même à la hauteur de notre connaissance, et pas  de notre savoir et de notre érudition.
Car la connaissance, reste une expérience vécue de concepts théoriques. Nous portons tous en nous comme humains, nos erreurs, nos doutes, nos certitudes, nos échecs. Notre tâche n’est pas de les déchaîner, mais de les combattre en nous,, et chez les autres : par la connaissance et le discernement !
Nous y sommes conviés, ici et maintenant, dans notre quotidien, pour notre salut, et tout au long de notre “vie bonne pleine” de sagesse.
Depuis le jour où nous sommes nés, nous effectuons au fil du temps des retours sur nous, invité par un principe intérieur, à vaincre l’aveuglement dans lequel nous nous trouvons.
De réflexions intenses, en questionnements intérieurs, nous prenons conscience de notre ignorance.
Et  s’il est une grande leçon de vie que nous apporte notre quête, c’est  de bien comprendre que  l’ignorance est la cause de tous les maux !
L’ignorance fatalement nous empêche de construire notre vie. Elle exclue au lieu d’inclure, elle isole au lieu de rassembler, elle produit de la haine en lieu et place de l’amour.
Apprendre à discerner pour repousser  l’ignorance. Cela requiert un savoir, une conscience et une réflexion personnelle.
A ce stade une question s’impose : pour apprendre à discerner  ne faut–il pas commencer par désapprendre ? Laisser de côté nos certitudes acquises sans liberté critique, ni conscience personnelles ? Ne faut-il pas rompre avec des préjugés liés à l’éducation, la religion ou la société ? Sortir des masques et des postures, pour commencer à progresser.
Nous recherchons la vérité  en recherchant la sagesse et l’élévation permanente dans nos valeurs. Une quête de connaissance primordiale pour celui qui veut vivre une expérience authentiquement humaine en toute liberté.
Car  l’ignorant n’est pas libre !
La recherche du discernment et l’aspiration à la connaissance, sont des possibilités de sortir d’un état de non-liberté pour s’approprier le monde.

Choisir notre voie

Bouddha, Socrate et Jésus, trois grands initiés, ne nous disent pas autre chose.  Émanciper l’individu au sein du groupe. Choisir notre voie.  Ces trois maîtres spirituels  nous demandent en permanence d’interroger et de réinterroger en connaissance et discernement, les notions de bien et de mal, de vrai et de faux, de juste et d’injuste.
Socrate disait souvent à ses interlocuteurs, qu’il ne savait rien, afin que ceux-ci remettent en doutes leurs propres certitudes. Il affirmait ne détenir aucune connaissance. Chez lui point de dogme, mais une progression en discussion pour accoucher les esprits, et montrer à ses interlocuteurs  les ignorances de leur propre discours.
Même si cela  peut conduire à  des conflits ou des divergences profondes,  remettre en question ses propres certitudes, ou accepter de changer de point vue n’est pas toujours facile. Vis-à-vis de soi et des autres. Il faut également s’attendre à faire face à l’hostilité des ignorants, car il peut en coûter d’avoir raison trop tôt, ou bien tout seul. Certains l’ont payé de leur vie, hier sur les bûchers, sous la torture ou encore dans les prisons.
Rappelons-nous que Platon, explique la fatalité du manque de connaissance et de discernement, par l’allégorie de la caverne. Des hommes prisonniers enchaînés dans une caverne sont éclairés dans leur dos par un feu, et ne voient que les ombres projetées sur la paroi qui leur fait face. Ils n’ont jamais rien vu d’autres, en réalité,  que ces ombres. Ils sont persuadés que c’est là, toute la réalité du monde. Dans son mythe Platon indique plus loin, qu’un de ses prisonniers se détacha de ses chaines, sortit de la caverne, vit le monde tel qu’il était, et fut guéri de son ignorance. Le voilà donc libéré. Ce mythe universel,  nous enseigne que la lumière de la connaissance, par l’expérience, est nécessaire pour discerner, repousser les ténèbres.
Bouddha  est aussi très pertinent. Lorsque le jeune Siddhârta sortant de son palais doré, découvre le monde réel, et à force de sagesse, s’engage sur la voie du milieu pour connaitre la plénitude et l’universalité de l’esprit. Toutes les traditions,  nous poussent vers cette recherche de soi, vers cette parole fondamentale et intérieure qui nous permet de mieux descendre en nous-mêmes,  afin de connaitre l’univers et l’humain. Bref, nous écarter des vérités définitives et des certitudes absolues qui ne sont que des leurres aveuglants.
S’étudier soi-même est essentiel. Le « connais-toi toi-même » de Socrate, maxime reprise du temple d’Apollon à Delphes est emblématique de cette quête. Se connaitre,  c’est mieux s’orienter et mieux apprendre l‘univers nous dit-il.  Pour nous il s’agit me semble -t-il de  trouver notre place dans un “qui suis-je  permanent”. User des valeurs à notre disposition pour mesurer, tailler la pierre brute, la nettoyer de ses aspérités, puis une fois polie,  élever les blocs, pour les insérer à l’équerre  et en verticalité dans l’édifice que nous sommes en train de bâtir, c’est à dire nous-mêmes. Un ouvrage à accomplir en toute humilité bien évidemment.
Jésus appelle aux mêmes réflexions. Chercher en nous le royaume. Aller  vers le spirituel au plus profond de nous, dans notre cœur et notre conscience et pas seulement dans les rites. Lorsque on lui demande qui faut-il vénérer pour trouver sa voie,  il répond simplement qu’il ne s’agit de trouver sa voie en esprit et en vérité.  Une parole simple qui renvoie chacun à son intériorité, dans son véritable temple, dans son cœur et son esprit où la rencontre peut s’opérer. Si on écoute sa voie intérieure on ne peut agir que de manière vraie juste et bonne, sans se forger d’idoles, ni leur obéir aveuglément.
Ces trois penseurs eurent en commun des valeurs. Les trois furent des hommes d’action pour faire la propre révolution de leur temple intérieur mais ils eurent aussi de cesse de vouloir transmettre et porter à l’extérieur du temple leur connaissance dans une idée de partage et de transmission.
Les trois, acceptèrent l’idée de sacrifice au nom de la mission qu’ils avaient à accomplir. Ils savaient qu’ils allaient mourir et  pouvaient fuir leur destinée, Jésus sur la croix, Bouddha en refusant le repas qu’il soupçonnait d’être empoisonné, et Socrate par le breuvage de la cigüe, mais tous acceptèrent de mourir pour leur idéal, non pas pour eux, mais pour apporter la lumière aux autres.

Devenir ce que nous sommes

Car il s’agit finalement de nous construire, en dépassant notre individualité. C’est tout le chantier de notre singularité collective, par notre prise de conscience, et en lien avec le cosmos. Ainsi avec discernement et connaissance nous recherchons, non pas finalement  la vérité mais plutôt notre vérité. Non pas la vérité des lois physiques ou mathématiques, ni celles métaphysiques  qui dépassent la raison, mais la seule connaissance nécessaire à notre équilibre et à notre progression,  celle de notre Humanité qui fait notre spécificité intime et personnelle, une connaissance enfouie en nous et qu’il suffit de faire émerger à nouveau. C’est une expérience  à laquelle nous parvenons par tâtonnements et ajustements avec autrui. En utilisant le verbe pour mesurer, comparer et apprécier la portée et les conséquences de nos actes. En droiture également  dans nos pensées et nos action et en respectant la tradition et la Loi universelle. C’est une aventure humaine,  de corps, d’esprit et d’âmes afin de nous insérer en humble maillon  dans une chaîne d’union des vivants et des morts.

Devenir ce que nous sommes en connaissance et discernement , voilà qui me donne envie de vous inviter à relire « l’œuvre au noir » de Marguerite Yourcenar. Le héros Zénon, incarnation d’un philosophe alchimiste de la Renaissance, pense à son avenir. Il veut s’épanouir, découvrir le monde et parcourir le temps. Il trace des plans imprécis  et choisit de s’intéresser à des sujets très divers, comme la médecine, l’alchimie, les voyages dans un monde cruel où règne l’obscurantisme religieux.  De ses rencontres Zénon forgera son esprit sur la société qu’il habite, et irritera les pouvoirs en place.
Au final Zénon gagnera sa liberté par son ouverture d’esprit et sa sagesse, même si, coupable d’être un libre penseur, il sera emprisonné, et  perdra sa vie.
En connaissance, discernement, volonté et liberté  Zénon est finalement devenu ce qu’il devait être : lui-même !
Et n’est-ce pas là  également notre destinée, à nous aussi de devenir en conscience, en connaissance et en discernement, ce que nous sommes ?

Alexandre Rosada
@2020

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