La Circulation de L’Esprit
Au fond nous avons l’impression que la navigation des siècles millénaires passés, nous concerne pour notre propre navigation actuelle.
Car au travers des mythes séculaires, ne s’agit-il pas de rétablir sur la vie terrestre, notre vie divine ? Hélas, au 21eme siècle, les statuaires et les effigies érigées dans nos cités, sont désormais muettes, comme devenus mortes.
Jadis inspiratrices, connectées avec le céleste, elles nous délivraient quotidiennement leur force et leur beauté. La perte des repères de la tradition, nous plonge de nouveau dans les ténèbres.
C’est pourquoi il faut aller puiser, en nous, la circulation de l’esprit.
Au commencement était le verbe, et le verbe s’est fait chair, c’est-à-dire nous, dans ce monde souterrain,
dans les grottes et les cavernes de nos pensées et de notre âme, en voyageant au travers de ces paysages lumineux de la création que dessinent justement la connaissance et la foi.
Plongé dans le macrocosme, nous sommes microcosme, incorporés en air, eau, feu, éther et nous formons avec les esprits, une figure unique et coagulée.
Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas, nous relate le grand œuvre mystérieux, et ce, alors que nous travaillons au dépassement de toutes les formes de dualités.
Libres, souverains, autonomes, nous faisons partis d’un tout à l’image du monde et de l’univers.
Nous cherchons à mourir à nous-mêmes, tel des hommes, justes et parfaits, à nouveau éclairés, répondant à l’injonction de St Jean dans son évangile « il faut que vous naissiez de nouveau ».
Cette dramaturgie de l’incarnation, jamais aucun dogme n’en rendit compte.
Aucune voix ne s’est levée pour lever le mystère de la création. Nous partageons l’infini du monde et celui de notre propre corps,
sans en percer sa profondeur mais en vivant dans sa profondeur, espérant réunir ce qui est épars.
Ainsi dans ce corps, artisan du salut, qui renaît transfiguré de l’essence divine, du père, du fils et de l’esprit sans oublier la sagesse portée par la connaissance, nous allons à la conjonction de l’esprit universel.
Mes conflits intérieurs, entre moi et le monde, entre moi et l’autre, se résolvent par l’axiome alchimique « solve et coagula », dissous et coagule.
Dissoudre par le raisonnement spéculatif et coaguler par la pratique. Une loi du binaire, de la force et de l’énergie, unique, invisible mais perceptible, car elle éclaire le chemin et nous projette en tant que corps mobile dans le plan cosmique de l’existence.
Renaître est donc, sortir de la matière primordiale par la connaissance, en faisant œuvre d’amour. Vouloir pénétrer les secrets de la matière en l’aimant, en s’identifiant à elle, pour précipiter notre propre chute, et ce, afin de revivre plus radieux que jamais.
La méthode est simple, décrasser toutes les aspérités et, débarrasser l’esprit de tous ce qui l’obscurcit, afin de rétablir sa lumière. Après la calcination, la transmutation d’un corps nouveau issu de la putréfaction s’opère.
« Sortez des apparences trompeuses » nous dit Platon. « Accouchez de votre esprit » ajoute Socrate.
Car il y a du mal ici-bas, et comment échapper au mal pour faire resplendir l’amour et la sagesse ?
Le symbole du soleil semble être la réponse.
Car qu’elle vie animale, minérale ou végétale pourrait sur terre se métamorphoser, si le soleil ne l’illuminait ?
L’astre pénètre tout et l’être vivant que nous sommes, avec cette énergie de la connaissance, s’élève tel un végétal. De la graine, à la plante puis à la tige nous devenons sous les rayons solaires de la connaissance, des êtres vivant enracinés.
De la croissance naît le bouton, qui se transforme en fleur, en fruits.
La cuisson régénératrice du soleil, mûrit et procure par sa puissance, une nouvelle génération.
Nous parlons ici, évidemment, de croissance au milieu des épines et des impies, afin de choisir la vie bonne, la bonne conduite ajustée sous le noble rameau de la parole.
Il s’agit finalement d’être conforme au plan céleste et porteur de fruits universels que nous ferons germer à notre tour, perpétuant le cycle éternel de l’existence.
Oui, cette lumière qui nous touche, cet esprit qui nous parle est une rêverie de tous les sens.
Elle nous plonge dans un état crépusculaire, le déploiement de l’imagination, l’activité spirituelle, telle une magie bienfaisante en union avec notre volonté et notre désir.
Ce commencement et cette fin, après ce long parcours autour de notre univers, nous engage à découvrir notre plus grande liberté, c’est-à-dire nous-mêmes comme une forme d’espérance et de salut.
Notre pierre philosophale, garante de l’immortalité, unie en son sein par les quatre éléments, nous pousse à percer l’unité profonde de la création.
Tour à tour, les masques de nos âmes renouvelées, nous dirigent à la source du royaume millénaire.
Humain et désormais fini, nous marchons vers le théâtre de l’infini, dans un enchantement quotidien.
C’est une forme de rencontre, repoussant les ombres. Une révélation illuminant nos nuits, comme une réalité absolue animée de l’amour.
Une alchimie solaire qui nous plonge en immersion permanente et en ordre avec la création.
Le chemin se crée. Il touche au cœur, sinon rien.
Le monde extérieur est l’ombres mais au fond de nous tout change et le retour à la lumière est celui de commencement.
La nuit, réservoir de songes, nous donne cette force de toutes les semences de la vie. En individu nous vivons dans le tout et le tout vit en nous. Nous sommes dans le temporel et l’éternel.
Pourtant, nous cherchons le plan, alors que nous sommes notre propre finitude, et nous l’ignorons.
Nous voici, en amour rayonnant, comme dans la cène christique, en partage de l’amour, lors du dernier repas, qui se situe dans la vie et annonce la mort prochaine.
Le mystérieux et le sacré cohabitent. Nous frappons à la porte et voilà qu’elle s’ouvre.
Nous étions eau et nous devenons vin, nous obtenons la sagesse de la foi. Nous qui n’étions auparavant à peine dégrossi. Si nous avions choisi de rester sans sagesse ni foi, nous serions restés insipides. Sans saveurs, ni de corps ni d’esprit.
Ainsi de ce mariage s’accomplit la circulation de la prophétie, ce dévoilement progressif qui est renouvellement de l’esprit humain jusqu’à ce qu’il parvienne à l’état de son propre créateur.
La chair et l’esprit semblent inséparables avec le pressentiment de la quête du paradis.
Ce voyage, tel un songe, se nourrit de l’intime. Il se poursuit sous les masques presque indéchiffrables de notre destinée, et ce voyage nous le menons dans le labyrinthe de notre cœur.
Depuis le commencement de cette histoire, me voici devenu le don suprême de l’invisible.
Mon itinéraire intérieur révélant le visible de son mystère, m’ a permis de découvrir cette source d’une grande pureté, où l’épreuve a déliée les meurtrissures du temps.
Par cette fontaine, je suis revenu au matin premier, lorsque le son premier occupait tout l’espace.
Mon corps spirituel issu de l’essence d’amour et mon corps extérieur demeure.
Tel un limon, une terre façonné par un laboureur de l’invisible, je témoigne que j’ai parcouru tous ces lieux en extase.
La lumière a tracé en moi son parcours.
Et je peux, à présent, disparaître.
Alexandre Rosada © septembre 2020
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