Johaben 9.10.11

9.10.11 JOHABEN

Au fil de sa progression, du 9e au 11e degré, Johaben subit des transformations intérieures.
Il apprend que la vérité et la justice qu’il cherche à l’extérieur nécessitent d’abord une union intérieure.

Au 9e degré du Rite Écossais Ancien et Accepté (REAA), l’initié traverse une épreuve symbolique en tant qu’Élu, un rôle souvent associé à la quête de justice et au désir d’accéder à des vérités cachées. Johaben, en tant que simple Élu des Neuf, commence son voyage en cherchant à venger et à réparer un ordre qui semble brisé. Son chemin le mène à la découverte de forces opposées et de mystères plus profonds qu’il ne le soupçonnait.

La transition au 10e degré, où il devient Illustre Élu, est une élévation qui symbolise l’intégration de ces aspects contradictoires en lui-même.
Ce processus le conduit à reconnaître que sa quête de justice n’est pas seulement tournée vers le monde extérieur, mais qu’elle doit aussi s’appliquer à sa propre âme, à ses propres conflits intérieurs.

Cette métamorphose de simple Élu à Illustre Élu, puis de Sublime Chevalier Élu, est l’expression même de l’élévation spirituelle.
Dans le cadre de ce rite initiatique, elle s’opère par une « descente en soi » une introspection profonde qui révèle les forces sombres et lumineuses qui cohabitent en chaque être.
Cette « descente » permet d’intégrer ces forces, de transcender les oppositions et de parvenir à l’unité intérieure.

Les métamorphoses successives de Johaben s’inscrivent dans une démarche alchimique : purifier, éclaircir et sublimer les aspects les plus profonds de soi pour ne plus être un simple élu en quête de justice, mais un être unifié et illuminé, porteur d’une justice qui naît de l’harmonie retrouvée en lui-même.

Être un élu.

Mais qu’est-ce que signifie être un élu ?
Dans son acception la plus ancienne, un “élu” est un “choisi” et, par-là, un “séparé”.
Ce choix, souvent perçu comme une faveur divine ou une distinction suprême, crée un écart entre celui qui est élu et ceux qui ne le sont pas.
Mais qu’est-ce que cela signifie véritablement être séparé ?
La séparation est-elle une solitude, une marginalisation, une exclusion ?
A mon avis, non pas vraiment, il s’agit d’un état qui s’accompagne d’une responsabilité énorme, car Être élu, c’est porter le poids de cette singularité, c’est se voir confier un rôle qui dépasse l’individu. C’est une mission qui transcende les simples désirs personnels pour toucher à l’universel.

Ainsi l’élu s’il est choisi se trouve face à lui-même : mais c’est pour  servir un idéal supérieur, du profane et sacré.
Si on y  regarde bien il n’y a pas de séparation !  Il y a illusion de séparation !
Parce que si l’élu est choisi, c’est au nom d’une collectivité qui donne sens à son élection.
L’élu n’existe donc pas pour lui-même, mais pour les autres.

En fait la distinction qui l’isole est aussi celle qui le relie.
L’élu devient ainsi un pont, une passerelle  entre le particulier et le collectif,
entre l’humain et le divin, entre la solitude et la responsabilité partagée.

Personnages hors du temps.

Séparé ou choisi il faut se souvenir que l’élection en maçonnerie, si l’on suit cette ligne de pensée, n’est rien d’autre qu’une opération de substitution.
A ce sujet on peut se souvenir de la signification des mots substitués.
Et le drame de la mort d’Hiram nous y invite lorsque nous le devenons par substitution.
Alors, oui ! Une substitution, mais à quoi ?
À ces personnages hors du temps, qui s’inscrivent et qui œuvrent dans des rôles immuables.
Et là, on touche à une fonction symbolique qui transcende les contingences du moi.
L’individu devient élu par la place qu’il occupe dans la structure.
La maçonnerie, en ce sens, offre un cadre, un espace vide, où l’élu ne fait que s’inscrire : prend racine, s’élève, fleuri, porte ses fruits et se fane !
Bref Il devient l’agent d’une fonction qui le dépasse.
Exactement comme l’analyste prend position dans la structure du discours pour permettre à l’analyste de trouver sa propre parole.
La vérité de l’élection est une fonction purement symbolique où le sujet, en se substituant à ces personnages hors du temps, n’accède pas à une essence, mais à une place dans un réseau de relations signifiantes.

Entrons dans le Rituel.

Au   9e degré, Maitre élu des Neuf.
Johaben est choisi par le sort avec huit autres  maîtres pour capturer l’assassin d’Hiram.
Qui est le sort qui prédestine son élection ? Au sens religieux du terme on peut dire Dieu, nous, ou le Grand Architecte de l’Univers.
Ainsi très vite Johaben va se retrouver face à lui-même dans ses choix.

Rappelons qu’il est guidé par un “étranger” (est-ce le Grand Architecte de l’Univers ?)
Cet étranger lui montre le chemin de la caverne.( symbole de la matrice ou du cabinet de réflexion, et/ou de l’œuf alchimique). Ce lieu se trouve près d’une source, d’un buisson ardent. Au ciel brille un arc en ciel  (Est-ce une présence divine ?)
Rappelons que Johaben est encore un jeune maître, il a donc l’ambition non discernée, et notamment du fanatisme pour venger la mort d’Hiram.  A l’intérieur de  la caverne,
d’un coup de poignard Johaben tue Abiram l’assassin d’Hiram et le décapite.
La tête tranchée est le signe pénal du premier degré : C’est le siège de l’esprit.
Il rapporte la tête du meurtrier d’Hiram à Salomon or celui-ci est mécontent. Grâce aux  huit autres maitres qui plaideront en sa faveur Johaben est pardonné.
Salomon dans sa grande sagesse fait preuve de Justice et non de vengeance. Un acte symbolique d’apaisement et d’intelligence du cœur. Johaben comme les huit autres maitres sont promu élu.

Au 10e degré, Illustre élu des quinze.
Un des meurtriers d’Hiram est mort mais il en reste deux à retrouver et à punir !
Johaben fait partie des quinze maîtres zélés pour trouver les 2 derniers assassins.
Cette fois Johaben,  a pris conscience de sa part de divin, il va donc  accomplir sa mission selon les préceptes de Salomon.
A ce stade  d’élu Johaben devient Illustre élu. Une promotion très importante lorsqu’on sait que le 33e est lui aussi nommé Très Illustre  Frère !
Mais revenons à cette désignation  cette fois Salomon assisté d’Hiram de Tyr décide des quinze maitres pour retrouver les deux derniers assassins !
Dans cette séquence c’est donc le choix du souverain et non plus le sort qui commande.
Au final, les quinze trouvent les 2 deux assassins.
Ils  sont châtiés ouverts par la vertical et l’horizontale, allusion pertinente à la transcendance et immanence, et Salomon tire au sort douze des quinze qui sont récompensés en devenant Sublimes chevaliers Elus.
Il sont gratifiés du nom d’Emerek :  hommes vrais en toute circonstances.

Ainsi la progression et l’évolution spirituelle de l’initié est pertinente lors de ces trois degrés d’Elus : 9 , 10 et 11éme
Johaben  est un symbole qui nous ressemble beaucoup.
Il est très humain car il fait des erreurs mais il cherche toujours à réparer et à trouver en lui sa vérité.
Il reçoit ainsi une partie de la lumière spirituelle et il poursuit son épure pour faire  reculer en lui le mal des trois mauvais compagnons.
Il choisit la justice et non la vengeance.
Le remerciement de Salomon c’est sa récompense au regard de son courage, de sa constance et de sa recherche de pureté.
Au 11e degré Johaben devient donc Sublime chevalier Elu.
Sublime  du latin “sub-liminus” suspendu en haut…En alchimie le passage d’un élément de l’état solide à l’état gazeux !

Notons à ce stade l’apparition du terme Chevalier, l’ordre chevaleresque que l’on va retrouver plus tard dans le rituel

Johaben est ainsi passé de la justice des hommes à celle du cœur, il obéit désormais à la loi universelle il est devenu Emerek
Il est en possession des vertus humaines et il élève sa pensée dans les hautes sphères de la pensée métaphysique. Mais rien n’est encore terminé !
Les épreuves qu’il a subis sont les récompenses  de notre conduite sur le chemin du devoir en nous hissant au sommet de nous-mêmes !
Ces titres marquent le chemin parcouru et il reste à parachever les plans et construire le temple, c’est la suite du Grand Maître architecte.

 La Notion de Récompense

Avant de conclure arrêtons nous sur la notion de Récompense.
La définition d’une récompense ici est la reconnaissance d’une transformation intérieure qui s’est opérée à travers l’expérience initiatique.
Elle n’est pas extérieure à l’élection, elle en est l’aboutissement, car l’élu est devenu digne de ce titre par l’épreuve même de la quête.
C’est un accomplissement spirituel, une reconnaissance de l’évolution de l’initié.
Election et récompense se complètent  dans une relation de continuité.
Il est intéressant de faire une analogie entre Johaben et Job. Tous les deux  vivent une forme de purification et d’initiation qui leur permettent d’aller vers leur propre unité.
Il vivent selon René Guénon une initiation effective et non virtuelle, c’est-à-dire que Johaben, c’est-à-dire nous-même  avons pleinement intégré dans notre vécu nos actes et nos pensées.
En fait l’élection est le point de départ, une invitation à se dépasser, à entrer dans une quête symbolique, tandis que la récompense, loin de neutraliser l’élection, la transcende en reconnaissant la transformation qu’elle a permise.
L’initié élu pour une mission est finalement récompensé non pas parce qu’il l’a menée à terme, mais parce qu’il a su se métamorphoser à travers elle. 

Conclusion

Ainsi dans ces trois degrés d’Élus je suis le principal sujet de cette histoire de justice.
Je suis prédestiné  à m’affronter a un moment donné par ma capacité à réaliser l’unité en moi.
La mise en mouvement est inscrite dans mon récit d’initiation.
Ceux qui cherchent sont prédestinés à ce que la quête rencontre notre moi intérieur, notre égo
La récompense valide ainsi l’élection en tant que processus de purification et de réalisation de soi, ancrée dans la progression initiatique.
Néanmoins, on pourrait aussi se demander si l’idée même de récompense, dans son aspect gratifiant, ne contient pas une possible neutralisation du principe d’élection.
Si la récompense devient le but ultime, n’y a-t-il pas un risque de dévier l’initiation de sa vocation spirituelle vers une recherche d’accomplissement personnel ?

Ce paradoxe est résolu lorsque la récompense n’est plus vue comme une fin en soi, mais comme une nouvelle étape dans une quête infinie, où chaque élection porte en elle la promesse d’une transformation toujours plus profonde.

Alexandre Rosada@rosada.net
Novembre 2024

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