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Liberté conditionnée et liberté absolue : la marche intérieure du Chevalier

Il y a dans la Loge une vérité silencieuse que seuls entendent ceux qui ont traversé la nuit du Maître et affronté le miroir brûlant du Chevalier : nous ne naissons pas libres, nous le devenons.
La liberté n’est pas un droit, mais une conquête ; non une proclamation, mais un combat intime.
Elle se dit en deux langues opposées et pourtant complémentaires : celle de la liberté conditionnée et celle de la liberté absolue.
Entre les deux s’étend la longue route initiatique où marche le Frère, tel un pèlerin sous l’étoile rouge du Kadosh.

La liberté conditionnée, c’est celle du monde profane qui nous a façonnés avant la Loge. Elle est faite de réflexes, d’habitudes, de dogmes, de peurs, de désirs qui nous gouvernent en secret. Elle est aussi celle de l’Apprenti, tenu au silence, contraint par la règle, limité dans sa parole.
À première vue, cette liberté ressemble à une chaîne. Mais en réalité, elle est une discipline, un socle, une matrice. Car c’est en acceptant la mesure, la règle et le rituel que nous faisons taire nos illusions pour entendre la voix plus haute de notre propre conscience. Le Temple extérieur éduque le Temple intérieur.

Puis, au fil des épreuves, une autre liberté se lève, plus intérieure, plus nue : la liberté absolue. Celle que nul pouvoir ne donne ni ne retire. Celle qui naît quand l’initié a dompté son propre chaos, dépassé la loi du monde et la tyrannie de l’ego. C’est la liberté du Chevalier Kadosh qui, face aux trônes, aux dogmes, aux mensonges, ne s’incline que devant la Vérité. Une liberté qui n’est pas rébellion, mais souveraineté intérieure. Elle est l’épée que l’on ne tire qu’en dernier ressort, et l’encensoir que l’on élève devant la Lumière.

Entre ces deux libertés se joue une dialectique, une respiration initiatique :
– la Loge nous limite pour mieux nous ouvrir,
– elle nous contraint pour mieux nous élever,
– elle nous impose des formes afin que nous trouvions la Forme de l’Être.

La liberté conditionnée est la marche basse du Temple ;
la liberté absolue est le faîte invisible où repose la grande Parole.

Comprendre cette dialectique, c’est comprendre que la plus haute liberté ne consiste pas à faire ce que l’on veut, mais à vouloir ce que l’on doit. Le Devoir devient alors une Lumière : non plus obligation, mais évidence intérieure. Ce n’est plus la règle qui nous guide, c’est la conscience éveillée.
C’est cela, être Kadosh : agir sans peur, parler sans haine, choisir sans faiblesse. Porter en soi une justice qui ne dépend ni des tribunaux, ni des princes, mais de la verticalité de l’âme.

Ainsi la Loge nous apprend qu’il n’y a de liberté absolue que pour celui qui a traversé librement ses propres ténèbres. Que la plus dure des chaînes n’est jamais extérieure, mais intérieure. Et que le véritable Chevalier n’a qu’un seul maître : la part la plus haute de lui-même.

Dans la Loge, comme dans la vie, la liberté est un travail. Elle se taille comme la pierre ; elle se purifie comme le métal ; elle se consume comme l’encens. Mais lorsqu’elle s’allume enfin, dans cette zone rouge où brille la Justice du 30ᵉ degré, alors l’homme devient son propre Orient.

Et, dans le silence du Temple, il comprend soudain que la liberté absolue n’est jamais donnée : elle est révélée.

Alexandre Remo ROSADA

Écrivain et Journaliste.

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